Système de transmission optique en propagation libre
La présente invention concerne un système de transmission optique en propagation libre et s'applique notamment aux télécommunications optiques.
Dans le domaine des télécommunications optiques, on est amené dans certains types d'applications, à rechercher une communication optique directe, en propagation libre dans l'atmosphère. Outre un coût plus faible, la transmission par faisceaux optiques en propagation libre permet de s'affranchir d'un réseau de fibres optiques ce qui ouvre le domaine spectral sur lequel peut être réalisée une transmission de données et permet une plus grande discrétion de transmission.
Les systèmes classiques de transmission optique dans l'atmosphère utilisent soit la détection directe, soit la détection hétérodyne. Il s'avère cependant que les effets de turbulence de l'atmosphère pénalisent fortement la transmission en perturbant le plan d'onde.
Pour un système à détection directe, les effets de turbulence se traduisent par une fluctuation spatiale du faisceau qui voit ses propriétés de focalisation, au niveau du photodétecteur, se dégrader. On peut même observer un évanouissement du signal lié au déplacement du faisceau dans le plan focal, la surface du photodétecteur étant finie et sa position fixée. Cet effet est d'autant plus important pour des débits de transmission élevés, la taille de la surface sensible du détecteur devant être plus faible.
La figure 1 illustre par un schéma le principe de la détection hétérodyne ou cohérente. La détection hétérodyne consiste à superposer au niveau du détecteur DET une onde W0 de pulsation ω0 issue d'un oscillateur local OL, à l'onde porteuse Wi de pulsation ω-] et véhiculant le signal de modulation à transmettre (pulsation ωm). Cette opération revient à mélanger au niveau du détecteur deux ondes de pulsations ωo et ωι+ωm, ce qui permet grâce à un filtrage approprié au niveau du détecteur d'augmenter considérablement le rapport signal sur bruit. Comme cela apparaît sur la figure 1 , l'onde porteuse Wi émise par des moyens d'émission optique SRC et recevant le signal électrique modulé S(t) à transmettre, présente après propagation en atmosphère libre, un front d'onde distordu. Il en résulte un mélange d'hétérodynage fortement altéré, et une efficacité de transmission réduite. La seule possibilité pour améliorer la détection consisterait alors à
disposer d'un système de mise en forme dynamique et adaptatif du front d'onde de l'oscillateur local, ce qui rend le système beaucoup plus complexe. La présente invention permet de remédier aux inconvénients précités en proposant un système de transmission optique en propagation libre dans l'atmosphère avec une auto-compensation des effets de turbulence.
Pour cela, l'invention propose un système de transmission optique en propagation libre d'au moins un signal numérique d'informations, comprenant des moyens d'émission lumineuse et des moyens de détection optoélectronique adaptés à la détection autour d'au moins une fréquence de détection donnée non nulle, caractérisé en ce que lesdits moyens d'émission émettent simultanément pour chaque signal à transmettre deux ondes lumineuses respectivement à deux fréquences optiques distinctes, l'une au moins desdites ondes étant modulée en intensité par ledit signal, et en ce que l'une au moins desdites fréquences de détection est égale à la différence desdites fréquences des ondes lumineuses émises.
Le système de transmission permet grâce à l'auto-compensation des effets de turbulence de pouvoir réaliser une fonction d'hétérodynage grand champ qui augmente l'efficacité de détection. D'autres avantages et caractéristiques apparaîtront plus clairement à la lecture de la description qui suit, illustrée par les figures annexées qui représentent :
- La figure 1 , un système de transmission avec détection hétérodyne selon l'art antérieur (déjà décrite) ; - La figure 2, un système de transmission selon l'invention ;
- La figure 3, la forme d'un filtre pour les moyens de détection selon l'invention ;
- La figure 4, un schéma illustrant un système de transmission crypté selon l'invention; - La figure 5, un schéma illustrant un système de transmission selon l'invention permettant de réaliser une fonction de multiplexage. Sur les figures, les éléments identiques sont repérés par les même références.
La figure 2 décrit par un schéma simplifié le principe du système de transmission optique en propagation libre selon l'invention.
Le système selon l'invention comprend notamment des moyens d'émission lumineuse SRC qui émettent simultanément pour chaque signal S-ι(t) numérique d'informations à transmettre deux ondes lumineuses notées W0 et Wι, également appelées porteuses, de pulsations respectives ωo et ωi distinctes, correspondant respectivement aux fréquences optiques distinctes vo et vι. On rappelle que pulsation ωo, fréquence v0 et longueur d'onde λ0 sont liées par l'équation ωo =2π vo =2 π c/ λo (1)
Où c est la vitesse de la lumière.
Selon l'invention, l'une au moins desdites ondes est modulée en intensité par le signal S-ι(t). Une optique de mise en forme Li par exemple, permet de former eux ondes planes qui vont se propager librement à travers le milieu de propagation perturbé, par exemple l'atmosphère, symbolisé par le repère ATM sur la figure 2. Les ondes sont alors collectées par une optique de collection L2. Selon l'invention, le système de transmission comprend en outre des moyens de détection optoélectronique DET adaptés à la détection autour d'au moins une fréquence de détection égale à la différence Δv≈v-i- vo des fréquences des ondes lumineuses émises. En utilisant ainsi deux porteuses optiques Wo et Wi à l'émission avec codage numérique par présence ou absence d'une ou des deux porteuses optiques, le système de transmission permet une auto-compensation des effets de turbulence. En effet, les deux ondes émises simultanément suivent les mêmes chemins optiques et subissent les mêmes effets de turbulence. Les variations de phase spatiales qui résultent des déformations locales du front d'onde se trouvent ainsi compensés au niveau des moyens de détection, résultant en une amélioration de l'efficacité de détection, comme cela est expliqué ci-dessous. Les moyens d'émission SRC sont par exemple formés d'une source laser bi-fréquence, dont la faisabilité a été démontrée par exemple par C.Gmachl et al. dans « Quantum cascade lasers with a heterogeneous cascade : two-wavelength opération » (APL, Vol.79, N°5, pp 572, 2001). Une telle source permet l'émission simultanée de deux ondes de longueurs d'onde différentes dont les intensités d'émission lumineuse peuvent être
modulées temporellement par un signal électrique externe. Dans le cas d'utilisation d'une telle source, les deux ondes émises sont modulées simultanément par le signal d'informations S-ι(t) à transmettre.
Les moyens d'émission peuvent également être formés de deux émetteurs laser indépendants dont l'intensité d'émission lumineuse de chacun des émetteurs peut être modulée temporellement par un signal électrique externe ; il s'agit par exemple de diodes laser. Ces deux émetteurs peuvent être synchronisés temporellement entre eux pour fournir simultanément le codage du signal à l'émission, ou, comme on le verra par la suite, un des émetteurs peut émettre en continu, seule l'intensité d'émission lumineuse d'un des émetteurs étant modulée par le signal d'informations à transmettre.
Nous expliquons plus en détail le principe du système de transmission selon l'invention, en supposant que les moyens d'émission SRC émettent deux ondes Wj (j=0 ou 1 ) de pulsation ωj sous la forme d'ondes planes et dont les champs associés s'écrivent :
Ê, = ëlAi{t)cos{wit + φj) (2) où ë représente un vecteur unitaire et exprime l'état de polarisation de l'onde émise, Aj est associé à l'amplitude du champ en fonction du temps (fonction enveloppe), φj représente un terme de phase défini à l'émission et propre à chacun des émetteurs.
Au cours de la propagation chaque champ accumule de la phase qui peut varier tout au long du trajet traduisant l'existence de phénomènes de turbulences et donc de fluctuations de l'indice de réfraction. Il s'ensuit que l'expression du champ pour chaque onde devient :
Ê. = e
jA
j (t) cos(û) + φ, + φ{x, y, z)) (3) où φ(x,y,z) est le terme d'accumulation de phase fonction des coordonnées spatiales x, y et z. On considère que les deux porteuses sont proches spectralement. En conséquence, le terme d'accumulation de phase est identique pour chacune des porteuses optiques Wj. Cette hypothèse reste valable tant que la dispersion du milieu de propagation reste faible, c'est à dire qu'il y a absence d'absorption résonante. Dans ces conditions, la dégradation du plan d'onde se trouve être similaire sur les deux porteuses.
Au niveau des moyens de détection optoélectronique DET, le champ incident est la somme des champs individuels et l'intensité optique totale l
τ s'écrit :
où Ë
0 et Ë. sont donnés par l'équation (3).
Cette intensité optique engendre un photocourant id qui présente un terme de modulation temporelle correspondant à la différence des fréquences de chaque onde propagée : id cc E0 2 + E1 2 + 2E0E1 cos((û)0 - û)1)t + (ç70 - ζ31) + ^(x,y,z) -ç?(x,y,z)) (5) soit : id oc E0 2 + E,2 + 2E0E. cos((û>0 - ω, )t + {φ0 - φ, )) (6)
Avec le système de transmission en propagation libre selon l'invention, on réalise ainsi un montage de type hétérodyne qui permet d'auto-compenser les perturbations du plan d'onde induites par le milieu de propagation. La technique proposée permet notamment de pouvoir réaliser une fonction d'hétérodynage grand champ puisque l'on s'est affranchi des perturbations du front d'onde liées à la propagation, ce qui permet d'augmenter l'efficacité de détection.
Un autre avantage du système de transmission selon l'invention concerne la stabilité à l'émission. En effet, il suffit que les deux émetteurs suivent la même dérive en fréquence pour que soit conservé l'écartement en fréquence au niveau des moyens de détection.
Un filtrage approprié au niveau des moyens de détection DET permet alors de détecter la composante à la fréquence de détection Δv. Avantageusement, les moyens de détection DET du système selon l'invention sont équipés d'un filtre passe-bande centré sur la fréquence de détection donnée par la différence des fréquences des ondes porteuses W0 et Wι et permettant de détecter la modulation du signal autour de ladite fréquence de détection. En utilisant un filtre hyperfréquence par exemple, la différence de fréquences Δv correspond à une différence entre les longueurs d'onde des deux porteuses de quelques dixièmes de nanomètres à quelques nanomètres. Typiquement, pour une longueur d'onde λ0 = 10 μm de l'onde porteuse W0 et une fréquence de détection Δv = 10 GHz, la différence de longueurs d'onde entre les porteuses doit être de 3,3 nm.
La figure 3 représente selon un exemple préférentiel la forme d'un filtre passe-bande hyperfréquence des moyens de détection. La distribution spectrale (unités arbitraires u.a.) du filtre est représentée en fonction de la fréquence (en Hz). La durée d'un bit élémentaire du signal numérique d'informations à transmettre définit la largeur du filtre hyperfréquence à mettre en œuvre. Dans l'exemple de la figure 3, la distribution spectrale est donnée par l'équation (6) suivante :
Où Δτ représente la durée d'un bit. Ainsi, pour un système opérant à la cadence de 1 Gbits/sec (Δτ = 1 ns) et pour une fréquence de détection (ou fréquence de battement), correspondant à la fréquence centrale du filtre, de 10 GHz, on obtient la fonction de distribution spectrale représentée sur la figure 3.
Selon une variante, le filtrage au niveau des moyens de détection peut être actif, par mélange avec un oscillateur local hyperfréquence à la fréquence Δv. Dans ce cas, le signal à la fréquence Δv issu du photodétecteur est mélangé dans un mélangeur hyperfréquence à un oscillateur local hyperfréquence à une fréquence v'. Le signal de sortie du mélangeur, après filtrage, est alors un signal à la fréquence v'-Δv (signal basse fréquence facile à filtrer). Il faut cependant que Δv-v' > vm, Vm étant la fréquence de modulation du signal à transmettre.
Le codage de l'information peut être transmis de la manière suivante. Si l'une des deux porteuses ou les deux porteuses sont absentes, aucun signal n'est détecté (le terme de modulation est nul dans l'équation (6) ci-dessus), ce qui correspond à un « 0 ». Par contre, il suffit que les deux porteuses soient simultanément émises pour qu'un signal puisse être détecté, ce qui va correspondre à un « 1 » binaire. Ainsi, la modulation peut être obtenue en faisant varier l'intensité soit de l'une, soit des deux ondes porteuses W0 et Wι. Les figures 4 et 5 représentent deux variantes du système de transmission en propagation libre selon l'invention.
La figure 4 représente un schéma d'un système de transmission crypté selon l'invention. Dans cet exemple, on cherche à transmettre un signal issu par exemple d'un signal optique propagé sur une ligne de
transmission par fibre optique FBR puis converti par des moyens de conversion optoélectronique OE en un signal électrique numérique Sι(t). On suppose par exemple que les moyens d'émission comprennent au moins deux émetteurs laser LAS0 et LASi émettant respectivement deux ondes W0 et Wi de fréquences vo et v-i, l'onde Wo étant continue et l'onde Wi modulée par le signal d'informations S-ι(t). Selon cet exemple, le système de transmission comprend des moyens de variation temporelle de la fréquence vi de l'onde modulée W-i, entraînant une variation temporelle de la fréquence de détection Δv(t)=v-ι(t)- vo selon une loi prédéterminée, lesdits moyens de détection DET étant adaptés pour la détection selon cette loi de variation. Par exemple, les moyens de détection sont équipés d'un filtre passe-bande centré sur une fréquence de détection Δvo donnée. Lorsque la différence des fréquences Δv(t) vaut Δvo, le signal est maximal, lorsqu'elle s'en éloigne, le signal diminue. On peut opérer ainsi un cryptage en déterminant au niveau des moyens de détection quel doit être la fréquence d'apparition du signal maximal. On réalise ainsi un cryptage de l'information permettant de contribuer à sécuriser le système de transmission.
La figure 5 illustre l'application du système de transmission selon l'invention à une transmission multiplexée en longueurs d'onde. La figure 5 illustre le principe pour la transmission de deux signaux numériques d'informations Sι(t) et S2(t) mais le principe peut s'étendre à un plus grand nombre de signaux. Selon cet exemple, les moyens d'émission comprennent trois émetteurs laser indépendants LASo, LAS-i, LAS2, l'émetteur LAS0 émettant une première onde lumineuse W0 en continu et les deux autres émetteurs laser émettant deux ondes lumineuses Wi, W2 à deux fréquences optiques distinctes vi et v2, ces deux ondes étant modulées respectivement par chacun des signaux à transmettre. Selon cette variante, les moyens de détection sont adaptés pour la détection autour de chacune des fréquences de détection correspondantes Δvi = v vo et Δv2 = v2-vo, par exemple au moyen d'un filtre passe-bande présentant deux fenêtres centrées sur lesdites fréquences de détection. Bien entendu, il est également possible d'opérer un cryptage de l'information sur les signaux transmis, comme cela a été décrit précédemment.
Ainsi, le système de transmission en propagation libre décrit dans l'invention permet une détection de type hétérodyne mais avec une auto-
compensation des effets de turbulence permettant une détection grand champ plus efficace. Ce système permet de bénéficier des propriétés de directivité liée à l'optique et de l'éventail des techniques de traitement du signal développées en hyperfréquence. Par ailleurs, avec le développement de diodes à cascade quantique, les fenêtres spectrales adaptées à la transmission dans l'atmosphère en présence de brouillard peuvent être employées. Ainsi, les fenêtres spectrales 3-5 μm et 10-12 μm peuvent être exploitées. Or plus la longueur d'onde est élevée, moins les effets de turbulence affectent le plan d'onde, ce qui permet avec le montage proposé d'accroître encore l'efficacité de la détection.