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Exposition transdisciplinaireAu Commun, la danse fertilise les arts plastiques

Agnès Geoffray, «Choreography 1», 2016, diapositives sur carrousel.

Au mur, une série de photographies en noir et blanc met en scène des mouvements de mains. Lesquels trouvent un écho dans la projection de diapositives sur la paroi adjacente, où défilent en gros plan des gestes gracieux, comme un ballet de doigts. Intitulés «Les impassibles» et «Choreography 1», ces deux ensembles d’images sont l’œuvre d’Agnès Geoffray.

L’artiste française compte au nombre des quatre plasticiennes exposées au premier étage du Commun dans le cadre du 2e millésime de Dance First Think Later, un festival pluridisciplinaire mêlant danse, performance et arts visuels.

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Agnès Geoffray, «Choreography 1», 2016, diapositives sur carrousel.
Agnès Geoffray, «Choreography 1», 2016, diapositives sur carrousel.
Agnès Geoffray, «Choreography 1», 2016, diapositives sur carrousel.

Agnès Geoffray a complété son installation par «Pièces à conviction» et «Écriture chorégraphique». Les premières consistent en un corpus de dix clichés documentant des injonctions griffonnées sur des bouts de papier par des braqueurs lors d’une attaque de banque – «be silent», «slide on the floor», «stand up look ahead»; la seconde, matérialisée sous la forme d’un ruban de coton accroché à hauteur de regard, comporte également des inscriptions liées à la gestique, qu’on pourrait interpréter comme une partition.

Vocabulaire de la danse

«Ce travail prouve que la danse est partout, bien davantage qu’on ne le pense, souligne Olivier Kaeser, curateur, à travers sa structure Arta Sperto, de la manifestation. Elle touche à beaucoup de questions, économiques, politiques, rituelles, sociales ou de genre.» L’historien de l’art, qui fut jusqu’en 2018 codirecteur du Centre culturel suisse de Paris, rappelle d’ailleurs que de nombreuses expressions issues du vocabulaire de la danse sont rentrées dans le langage courant, ainsi du «chassé-croisé» des vacances ou du «ballet diplomatique».

Emilie Pitoiset, «Tainted Love», 2017-2022, photographies; «Not Yet Titled #2», 2017, sculpture; «Sweat core pulls up tonic dreams», 2022, adhésif.

On l’aura compris, ce qui réunit les artistes choisies par Olivier Kaeser pour l’exposition du Commun est leur intérêt pour la chose dansée, comme pratique ou sujet d’investigation. Emilie Pitoiset s’est penchée sur les marathons de danse qui émergent dans la période de la Grande Dépression aux États-Unis. Durant cette ère de détresse économique, des couples s’affrontaient sur la piste pendant des heures, voire des jours, contre rétribution et jusqu’à épuisement.

Ulla von Brandenburg, «Feste Erde, flüssiger Wind», 2021, extrait vidéo.

La créatrice s’est emparée de photos d’époque saisissantes où figurent des tandems morts de fatigue, effondrés dans les bras l’un de l’autre. Elle les a mis en regard de sculptures en tubes de métal esquissant des corps, qui revisitent les postures visibles aux cimaises. Affublées de vêtements contemporains liés à une certaine forme de violence urbaine, ces statues jouent sur les liens entre passé et présent, tout comme les lettres inscrites à l’adhésif noir sur les murs, qui reprennent l’esthétique des captchas (ces tests utilisés en informatique afin de vérifier que l’utilisateur n’est pas un robot) pour parler du culte des corps d’aujourd’hui.

Alice Anderson, «Ecosytem Processes, Calder’s Door», sculpture et peinture.

Apprivoiser l’architecture

Alors que dans un film de l’Allemande Ulla von Brandenbourg baptisé «Feste Erde, flüssiger Wind», un groupe d’hommes et de femmes exécute rondes et tableaux vivants à la manière de rituels collectifs évoquant l’utopie communautaire du Monte Verità, Alice Anderson danse, littéralement, l’architecture de l’atelier d’Alexander Calder. Dans une vidéo, on voit la peintre et performeuse britannique apprivoiser physiquement cette grande halle dans laquelle le sculpteur américain travaillait près de Tours, en France.

Lara Dâmaso, «Echolocations», extrait vidéo.

Par effleurages et tapotements, Alice Anderson y mémorise en particulier les formes de la porte, composée de 24 éléments triangulaires. Avant de les reproduire comme autant de composants d’un mobile: colorés et suspendus à l’aide d’un fil cuivré, ils flottent dans l’espace du Commun, aussi légers qu’un corps de ballet. En face, une immense toile porte les empreintes négatives de ces panneaux, souvenirs du geste de la peinture.

Une cinquième artiste est à découvrir au deuxième étage, où une salle est réservée aux performances. La jeune Suissesse Lara Dâmaso y montre «Echolocations», une œuvre vidéo coproduite par l’exposition. Elle a convié deux autres artistes dans l’environnement très minéral des Alpes grisonnes pour questionner la voix et son usage. Hésitant entre le chant et le cri, l’allusion préhistorique et le manifeste féminin, le film s’avère un rien éprouvant.

Jusqu’au 9 octobre au Commun, 28, rue des Bains. Ma-di 11 h-18 h

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